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I
La victoria fort élégante, attelée de deux superbes chevaux noirs, attendait devant le perron de l'hôtel. C'était à la fin de juin, vers cinq heures et demie, et, entre les toits qui enfermaient la cour d'honneur, le ciel apparaissait plein de clarté, de chaleur, de gaieté. II
La comtesse de Mascaret, enfermée en sa chambre, attendait l'heure du dîner comme un condamné à mort attend l'heure du supplice. Qu'allait-il faire ? Était-il rentré ? Despote, emporté, prêt à toutes les violences, qu'avait-il médité, qu'avait-il préparé, qu'avait-il résolu ? Aucun bruit dans l'hôtel, et elle regardait à tout instant les aiguilles de sa pendule. La femme de chambre était venue pour la toilette crépusculaire ; puis elle était partie. III
C'était à l'Opéra, pendant un entracte de Robert le Diable. Dans l'orchestre, les hommes debout, le chapeau sur la tête, le gilet largement ouvert sur la chemise blanche où brillaient l'or et les pierres des boutons, regardaient les loges pleines de femmes décolletées, diamantées, emperlées, épanouies dans cette serre illuminée où la beauté des visages et l'éclat des épaules semblent fleurir pour les regards au milieu de la musique et des voix humaines. IV
Dans le coupé qui les ramenait chez eux après la représentation de l'Opéra, le comte et la comtesse de Mascaret, assis côte à côte, se taisaient. Mais voilà que le mari, tout à coup, dit à sa femme : 2 - 7 avril 1890 |
Créé le 12-01-2009 11:13:44 |